(non parue au JO)
Aux termes de l'article 1er du décret n° 92-478 du 29 mai 1992,
l'interdiction de fumer dans les lieux « affectés à un usage collectif » énoncée à
l'article 16 de la loi n° 91-32 du 10 janvier 1991 s'applique aux lieux de travail.
Les modalités selon lesquelles les principes posés par la loi s'appliquent dans les
entreprises, modalités définies pour l'essentiel à l'article 4 du décret, ont fait
l'objet de la brochure à l'attention des chefs d'entreprise et des partenaires sociaux
jointe à cette circulaire.
Bien que les dispositions du décret relatives aux entreprises qui trouvent leur
fondement dans des préoccupations de santé publique ne s'inscrivent pas dans le Code du
travail mais dans le Code de la santé publique, les services d'inspection du travail
seront interrogés sur certains aspects de leur mise en uvre. La présente note a
pour objet d'apporter des précisions nécessaires.
1 - Règlement intérieur
Les différentes mesures arrêtées par le chef d'entreprise pour satisfaire à la
législation sur l'usage du tabac n'ont pas à figurer au règlement intérieur, puisqu'il
ne s'agit pas de « mesures d'application de la réglementation en matière d'hygiène et
de sécurité » au sens de l'article L. 122-34 du Code du travail, comme l'a jugé le
Conseil d'État (CE 4 mars 1988, SA Bopp Dintzner Wagner et Cie).
Elles n'ont donc pas à être soumises à consultation du comité d'entreprise, mais
uniquement à la procédure particulière prévue par le décret du 29 mai 1992, à savoir
consultation du CHSCT (ou des délégués du personnel). Elles n'ont pas davantage à
être soumises au contrôle de l'inspecteur du travail. Dans le cas où l'inspecteur du
travail serait saisi d'un avenant au règlement intérieur portant sur ce sujet, il devra
demander au chef d'entreprise le retrait de toutes les clauses qui s'y rapportent.
Lorsque le chef d'entreprise entend faire figurer dans un document les conséquences
des règles posées par le décret du 29 mai 1992 dans ses locaux, ce document est donc
distinct du règlement intérieur.
Il en va évidemment tout autrement des clauses édictant une interdiction de fumer
dans des locaux de travail à raison soit des risques d'incendie et d'explosion soit
d'aggravation d'exposition à une pathologie professionnelle, interdictions tirées de
textes réglementaires spécifiques dont la liste est rappelée en annexe.
2 - Consultation du CHSCT (ou des délégués du personnel)
Dans le cadre de la législation sur l'usage du tabac, doivent être soumis à
consultation du CHSCT :
- la décision de mettre des emplacements à la disposition des fumeurs dans les locaux
« affectés à l'ensemble du personnel » : salles de restaurant, de réunion, de
formation, de repos, etc. (art. 5 du décret). Cette consultation est renouvelée sous les
deux ans ;
- le plan d'aménagement de ces mêmes emplacements (art. 4 II a) ;
- le plan d'organisation ou d'aménagement destiné à « assurer la protection des
non-fumeurs » dans les locaux de travail proprement dits (autres qu'individuels), plan
qui doit être actualisé en tant que de besoin tous les deux ans (art. 4 II b).
Dans la pratique, il va de soi que ces différentes consultations, distinctes dans leur
objet, pourront être faites au cours d'une seule et même réunion du CHSCT (ou des
délégués du personnel).
Le refus avéré de l'employeur de saisir le CHSCT (ou les délégués du personnel)
pourra être relevé comme constitutif du délit d'atteinte au fonctionnement régulier du
CHSCT (ou à l'exercice régulier des fonctions des délégués du personnel) défini à
l'article L. 263-2-2 (ou L. 482-1) du Code du travail.
3 - Les sanctions
La législation vise, dans son esprit, à rechercher des solutions conciliant les
impératifs de santé publique et le respect des libertés individuelles.
Les sanctions pénales prévues par le décret sont de deux ordres, selon qu'elles
visent l'employeur, en tant que responsable des locaux visés par la loi, ou le salarié
qui contrevient à l'interdiction de fumer.
- S'agissant du chef d'entreprise, les infractions qu'il peut commettre (contraventions de
la 5e classe) sont les suivantes :- non conformité des emplacements réservés aux fumeurs ;
- non respect des normes de ventilation de ces mêmes emplacements ;
- défaut de signalisation.
- La constatation des infractions commises par les salariés qui auront fumé dans un lieu
visé par l'interdiction, hors de l'emplacement éventuellement réservé aux fumeurs
(contraventions de la 3e classe) n'incombe pas davantage aux services d'inspection du
travail, puisque les dispositions en cause ne figurent pas au Code du travail. Dans ce cas
encore, seuls les officiers et agents de police judiciaire ont compétence pour relever
les infractions.
La constatation de ces infractions ne relève pas de la compétence des inspecteurs du
travail, mais de celle des officiers et agents de police judiciaire, dans les conditions
prévues par le Code de procédure pénale.
Si le chef d'entreprise entend faire usage, bien que les dispositions en cause ne
figurent pas dans le règlement intérieur, du pouvoir disciplinaire que lui confèrent,
de façon générale, les articles L. 122-40 et suivants du Code du travail, il vous
appartient, si vous êtes saisi, d'appeler son attention sur la nécessité de respecter
le principe posé par l'article L. 122-43 de proportionnalité de la sanction à la faute
commise. Il est clair, en effet, que le seul fait d'avoir, par mégarde, fumé dans un
espace non fumeur ne saurait, à lui seul, justifier une sanction disciplinaire dont
l'application ne paraît justifiée qu'en cas de comportement compromettant le
fonctionnement normal de l'entreprise.
Annexe
A - Locaux ou travaux assujettis à l'interdiction de fumer
1 - À raison des risques d'incendie et/ou d'explosion
- locaux ou emplacements dans lesquels sont entreposées ou manipulées des substances ou
préparations classées explosives, comburantes ou extrêmement inflammables
article R. 232-12-14 du code du travail - établissements pyrotechniques
article 6 du décret n° 79-846 du 28 septembre 1979 - manipulation et transport de produits explosifs sur les chantiers du bâtiment et des
travaux publics
article 8 du décret n° 87-213 du 27 mars 1987
2 - À raison du risque d'aggravation de pathologie professionnelle -
- locaux où se répandent des poussières arsenicales
article 8 du décret n° 49-1499 du 16 novembre 1949 - locaux susceptibles de présenter des risque dus au plomb
article 12 du décret n° 88-120 du 1er février 1988
B - Locaux où le personnel doit être invité à ne pas fumer -
- établissements où les travailleurs sont exposés à l'action du bioxyde de manganèse
circulaire TMO 23 du 20 novembre 1957 - établissements où les travailleurs sont exposés à l'inhalation de poussières
d'amiante